REQUÊTE AUPRES DE LA COUR CONSTITUTIONELLE en dénonciation des dispositions antidémocratiques et à rebours de l’éthique politique, moteurs de déficit de transparence électorale, contenues dans le Code électoral N° 29 Ter, Dépôt légal 777, du 6 août 2024, ratifié par le général Brice Clotaire OLIGUI NGUEMA

Requête introduite par des membres de la plateforme REFERENDUM : Je vote NON, dont les noms suivent :

MALEKOU MA MALEKOU Marc Ulrick

Président du Mouvement Panafricain OSONS POUR L’AFRIQUE

MOUANGA MBADINGA Jean Victor

Premier Secrétaire du Mouvement d’Emancipation Socialiste du Peuple, M.E.S.P

ONDO ASSOUMOU Thierry

Président du Mouvement de Redressement National, MORENA

KIBAT LEKOLO GNAMANGO Cendrine

Secrétaire Générale du Mouvement Panafricain OSONS POUR L’AFRIQUE

BIVIGOU NGUIMBI Joa Vanilly

Membre du Mouvement Citoyen « Les Sentinelles de la République »

SAULNEROND Germaine Sophie

Présidente de l’ONG « Un sourire en prison ».

Libreville, le 14 août 2024

A

Monsieur le Président de la Cour Constitutionnelle

Nous avons l’honneur de venir auprès de votre bienveillance, soumettre à votre attention notre préoccupation de voir être réécrites, les dispositions controversées du Code électoral, mentionnées ci-haut.

Notre requête est motivée par l’article 36 de la loi organique sur la Cour Constitutionnelle, qui dispose que la saisine de la Cour Constitutionnelle peut se faire par toute personne physique ou morale lésée par la loi, l’ordonnance ou l’acte règlementaire attaqué.

En effet, certaines dispositions du Code électoral, N° 29 Ter, Dépôt légal 777, du 6 août 2024, violent l’esprit d’inclusivité, de transparence électorale et de pluralisme démocratique, fondu dans le marbre, tant dans la charte de la transition, que dans l’ensemble des montures de notre Constitution, écrites après le retour au pluralisme politique en 1990, à l’issue du règne du Parti unique.

D’entrée, les dispositions relatives à la nomination par le Ministre de l’Intérieur, des membres des commissions électorales Provinciales (article 19 nouveau) ; des membres des commissions électorales Départementales ( article 20 nouveau) ; des membres des commissions électorales Communales (article 21 nouveau) ; des membres des commissions électorales d’Arrondissements ( article 21 bis nouveau) ; des membres des commissions électorales de Districts (article 22 nouveau) ; outre les membres de bureaux de vote, via les Présidents des commissions électorales des circonscriptions administratives distinctes ( article 14 a nouveau). Un attelage de dispositions, qui plombe le sacro-saint principe d’inclusivité prônée par la Charte de la transition, idem celui de pluralisme démocratique, qui irrigue le préambule du moule Constitutionnel.

Dans cette dynamique, la Charte de la transition met en relief, la nécessité de bâtir, je cite « ENSEMBLE » d’une manière durable, les fondamentaux d’une République stable. « ENSEMBLE » implique le principe de main d’association, par opposition au principe visant à faire « CAVALIER SEUL ». Comme cela transpire malheureusement, dans les dispositions querellées, qui dévoilent l’accaparement des leviers de l’organisation des élections par le seul Comité pour la Transition et la Restauration des Institutions, CTRI. Des agissements du CTRI, qui mettent à mal les acquis démocratiques obtenus de haute lutte, dont la gestion et l’organisation des élections par une administration électorale indépendante et autonome, sous l’assistance technique du Ministère de l’Intérieur. La restauration de l’institution électorale, ne saurait s’accommoder à ces pratiques, dignes de reculade du processus de démocratisation du pays. L’inclusion des forces vives de la Nation, qui a été par ailleurs, la trame de la Conférence nationale de 1990, qui a mis le Gabon sur les rails du multipartisme intégral.

Rappelons que c’était par souci de tendre vers des dispositions électorales progressistes, aux antipodes de celles similaires, en leur temps, contenues dans le Code électoral N° 224/PR/MPEAT du 3 février 1993, que la classe politique nationale (Pouvoir-Opposition), s’était donné rendez-vous dans la capitale française, à la faveur des « Accords de Paris ». Des accords sur fond de « paix des braves », qui avaient permis de tourner le dos à ces dispositions électorales passéistes, et donc, anachroniques. Les Commissions électorales, dotées d’une autonomie de fonctionnement remplacèrent dans la foulée au sein des Codes électoraux pondus après 1994, cet « Ordre ancien », curieusement remis au goût du jour par le CTRI. Piqûre de rappel, les membres des commissions électorales et des bureaux de vote, dans les montures des Codes électoraux adaptés à l’air du temps, au sortir de ces « Accords de Paris », et ce, jusqu’au soir du 30 Août 2023, étaient nommés de façon tripartite : les Présidents des Commissions électorales et des bureaux vote, nommés par l’administration centrale, c’est-à-dire, le Ministère de l’Intérieur, personne morale, et non par le Ministre de l’Intérieur, personne physique. Les autres membres étaient nommés de façon paritaire (Pouvoir-Opposition), s’agissant des deux Vice-Présidents et des deux Rapporteurs, tant au niveau des Commissions électorales, que des bureaux de vote.

Au nom des élections aux lendemains apaisés, et donc, au nom de la paix sociale, de la transition inclusive et du pluralisme démocratique, il serait de bon aloi d’impliquer toutes les sensibilités politiques et sociales (société civile), dans cette œuvre de construction démocratique, dont l’action de déconstruction en cours, heurte l’éthique politique.

Le rétropédalage en gestation, au profit des dispositions électorales qui ont fait la preuve de leurs limites, pourrait constituer un terreau favorable au retour des « vieux démons ». Car elles portent les germes de l’arbitraire, en confinant les représentants des partis et des groupements politiques, dans des rôles d’observateurs dans les bureaux de vote, c’est-à-dire, de mandataires sans le moindre avis consultatif. Toute chose qui les réduit au statut de simples figurants dans les bureaux de vote.

Sur un tout autre volet, l’article 19 nouveau, prévoit l’incinération publique, immédiatement après la fin du dépouillement, des bulletins de vote contenus dans l’enveloppe portant la mention « vote », et ceux contenus dans l’enveloppe portant la mention « poubelle ». Permettez-nous, Monsieur le Président, de constater pour le regretter, que cette disposition entraverait le principe de transparence électorale, si la requête introduite auprès de la Cour Constitutionnelle, serait en rapport avec les documents incinérés, notamment en cas de demande de recomptage des voix, voire, d’authentification de la véracité des procès-verbaux.

Pourquoi se jeter avec précipitamment dans un projet d’incinération d’actes électoraux, avant la fin du contentieux électoral ? A qui profiterait une opération de « dissimulation » vaille que vaille, de « l’arme du crime », avant l’aboutissement de l’enquête, pardon, du contentieux post électoral ?

Enfin, permettez-nous de récuser le Ministre de l’intérieur comme administrateur et organisateur des élections (article 7 nouveau). Car pour des raisons d’éthique et de décence politique, le Ministre de l’Intérieur, nommé par le Chef de l’Etat, est frappé de déficit de neutralité, surtout que le camp au pourvoir présente des candidats, singulièrement lors de l’élection présidentielle. Le Ministre de l’Intérieur ne saurait être juge et partie.

En lieu et place du Ministre de l’Intérieur, nous appelons de tous vœux au retour à l’organisation des élections en bonne intelligence, entre le Ministère de l’Intérieur et une administration électorale indépendante.

Dans l’intervalle, veuillez agréer, Monsieur le Président de la Cour Constitutionnelle, l’expression de notre profond respect.